Choc des cultures et des religions

1609 : Christovao Ferreira, jeune jésuite portugais plein de ferveur chrétienne, débarque à Nagasaki. Ce port est alors un panier de crabes : trafics d’or, de soie, d’esclaves auxquels s’adonnent des commerçants du monde entier. Le sud du Japon devient par ailleurs un terrain où s’affrontent les intérêts impérialistes des Anglais, des Espagnols, des Portugais, des Hollandais et où s’importent leurs querelles religieuses : protestants contre catholiques.
Accueillis d’abord avec sympathie, les missionnaires sont bientôt suspects aux yeux des Shogun Tokugawa qui dirigent le pays d’une main de fer. On voit en eux l’avant-garde des conquistadors du roi d’Espagne. Commencent alors d’impitoyables persécutions. Passé dans la clandestinité, Ferreira est arrêté, mis à la torture.
Il a le choix : mourir en martyr comme tant de ses semblables ou apostasier et travailler dans les rangs de l’Inquisition nipponne…
Dans ce Japon énigmatique « tout à l’envers de nos mœurs » où il a si longtemps vécu, et en ces temps où le doute métaphysique a frappé les esprits les plus éclairés d’Europe, Ferreira, lui-même ébranlé dans ses convictions, cèdera-t-il à ses bourreaux?


Rentrée littéraire

couv74760623Ecrire sur la religion, voilà un thème difficile et particulier. Savoir retranscrire les faits sans prendre parti pour l’un ou pour l’autre s’avère souvent compliqué et plutôt casse-gueule, surtout si on ne veut pas avoir ensuite les dit religions sur le dos. Pourtant avec « Le Ciel ne parle pas », Morgan Sportès réussi un coup de maître et passe l’épreuve haut la main.

Le Ciel ne parle pas, comme son titre ne le laisse pas deviner de façon limpide (j’ai mis du temps à le comprendre) parle d’un fait historique peu connu. Celui de l’évangélisation du Japon féodal au XVIIe siècle par les Portugais/Espagnol (alors sous la même couronne). Depuis plusieurs années, j’aime particulièrement l’histoire du japon féodal, par ses mœurs, son art ou juste le regard qu’il a eu sur le monde. J’avais eu vent de ce fait historique sans pour autant entrer dans les détails. Il faut dire que les japonais à ce siècle faisaient une tentative d’ouverture sur le monde extérieur principalement par le commerce avec les portugais, les espagnols et les hollandais (ces derniers reviendront quelques siècles plus tard). Et ça réussissait plutôt bien. Mais le St-Siège et les Portugais ont voulu évangéliser et convertir le peuple japonais à la religion chrétienne. Le Shogunat n’a pas trop apprécié et à commencer à leur faire clairement comprendre le problème. En les persécutant. Les prêtres, mais également le propre peuple japonais converti.

« Beaucoup parmi nous pensent que la croyance en une Vie future est de la plus capitale importance…. Or, on les a torturés à mort. »

Et c’est ce que le livre relate de façon très clair, en nous mettant dans la peau du Père Ferreira, fraîchement apostat. M.Sportès ne prend le parti de personnes et relate, avec une pointe d’humour un poil grinçant. On est très loin du classique livre d’Histoire, mais plus d’une sorte de docu-fiction. Les faits se déroulent sous nos yeux avec au fur et à mesure les anecdotes de tel ou tel personnage. Et c’est addictif ! Le livre est ultra nourri par la culture japonaise et j’ai autant appris qu’apprécier. Ce qui est surprenant avec le livre (enfin surtout les faits), c’est qu’on prend conscience des deux côtés de la culture japonaise. Ils sont très raffinés autant dans leurs arts, que dans leurs manières d’êtres, mais savent être tout autant cruel. Les différentes scènes et stratagèmes mis en place dans la destruction de la religion chrétienne sur leur terre le montre.

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La persécution des Jésuites

Enfin, je ne dirais plus qu’une chose, fonçait le lire. C’est nourri, très bien écrit et ouvre les yeux sur deux cultures et deux religions totalement différentes. Et dernier conseil, après avoir lu le livre, regardait donc SILENCE de Scorsese. Le film traite du même sujet et on retrouve certains personnages dont Ferreira. Un vrai coup de cœur (pour les deux).

Au passage, si vous avez des livres à me conseiller où l’histoire se déroule au Japon féodal, je suis preneuse 🙂


Edition FAYARD

Note 19/20 (Oui, rien que ça !)

Pages 320


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6 réponses à « Le ciel ne parle pas – Morgan Sportès »

  1. Avatar de flyingelectra
    flyingelectra

    J’ai immédiatement pensé au film en lisant ta chronique – sais-tu si le réalisateur s’est inspiré de ce livre ? le film me faisait un peu peur, j’avoue – je vais voir si le livre est dispo à la BM

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    1. Avatar de Ségolène
      Ségolène

      Le réalisateur s’est inspiré du livre du même nom, Silence de Shusaku Endo. Le Ciel ne parle pas, sort quant à lui dans 15 jours 🙂

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  2. Avatar de Soie – Alessandro Baricco – Uranie

    […] et des écrits. C’est la forme que j’aime le plus, où tout est suggéré. Là où Morgan Sportès écrivait le Japon avec force détails, Alessandro Barrico est plus dans un tableau impressionniste […]

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  3. Avatar de Bilan Août 2017 – Uranie

    […] Morgan Sportès – Le Ciel ne parle pas […]

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  4. Avatar de Bilan 2017 et premier mois sur la blogosphère – Uranie

    […] Lars Kepler (Actes Sud/Noir) / Une histoire des abeilles, Maja Lunde (Presse de la Cité) / Le Ciel ne parle pas, Morgan Sportès (FAYARD) / La femme qui fuit, Anaïs Barbeau-Lavalette (Le livre de poche) / Blade Runner, Philip K.Dick […]

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  5. Avatar de Massacre des Innocents, Marc Biancarelli – Uranie

    […] Le ciel ne parle pas, Morgan Sportès […]

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